Implantation / plan de situation
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Triple souci : |
Un paramètre : |
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Contrairement aux longères de pêcheurs, les villas font face à la mer ou à la rue.
(Lorsque leur façade donne sur la rue, de larges ouvertures sont pratiquées dans le mur côté mer).
Isolées ou jumelées, les villas balnéaires cauchoises sont surtout situées dans les valleuses ou dans les vallées des fleuves côtiers. |
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Ces maisons sont de type pavillon avec étage(s) (contrairement à la longère de plain pied mais comme la maison de patron-pêcheur).
Cette élévation entraîne la construction d'un perron (escalier extérieur avec marches droites ou tournantes), là encore en rupture avec la longère.
Il y a souvent deux entrées :
-entrée principale (côté rue)
-entrée secondaire (côté jardin / mer)
Détail des pièces :
Ce qui frappe au premier coup d'oeil, c'est qu'on a affaire à des petites pièces.
Sur le plan de la villa Colin :
-salle à manger (4x5,5m)
-salon (3x3,5m)
-cuisine (4x2,5m)
-office (3x1m)*
*partie d'une maison où l'on dispose tout ce qui dépend du service de table
-chambres des maîtres au Nord (pour éviter le soleil)
-chambres des employés au Sud
-chambres de bonnes sous les toits
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La construction de ces villas est relativement rapide (elle débute au printemps pour s'achever à l'automne*). On peut avancer plusieurs explications : architecte maître d'oeuvre, matériaux industriels - brique rouge, poutrelles acier, mortiers, etc. - et main d'oeuvre nombreuse et bon marché.
* Voici par exemple les principales dates de la construction de la villa "Les Mouettes", celle-la même que Bernard Triponel vient d'acheter.
Pour le chalet Peltier (Les Catelets), ce sera de-même, début des travaux aux premiers jours du printemps 1885 et fin à l'automne de la même année. Mon ancêtre, pour cette dernière maison, précise que l'équipe de maçons est picarde. Pierre Wallon |
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À l'intérieur, le bois est omniprésent :
plafond à caissons du 1er étage
planchers des 1er et 2ème étages
lambris de la salle et du salon
escalier central
plinthe stylobate* (marque du 19ème siècle)
* moulurée
en pitchpin et sapin
solives utilisées pendant la guerre par les Allemands pour faire des pieux anti-parachute dans la plaine.
-TSF, TV (1970)
-assainissement collectif (2000)
-téléphone cellulaire (encore des problèmes de couverture du réseau !)
Des constructions au goût du jour
garages et courts de tennis
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La villa balnéaire trouve ses origines dans les engouements architecturaux, très éclectiques et pleins de fantaisie du 19e siècle. En effet, à cette époque, l'éclectisme - courant d'architecture qui érige la copie en style - est remis à l'honneur. Pour Camille Albert, architecte de La Bénédictine, l'éclectisme «était bien plus rêverie d'un passé renommé qu'annonciateur d'un avenir incertain». [O.Dufossé, Hommage à Camille Albert]
L'influence coloniale et le goût pour l'exotisme sont omniprésents. De même, on trouve ici une déclinaison provinciale des courants architecturaux présentés lors d'expositions universelles, comme celle de 1878. Villas anglo-normandes, castels, chalets italiens et autres curiosités à la façon mauresque, médiévale ou orientale sont ainsi édifiés tout au long du littoral cauchois.
Les noms des villas témoignent de ces influences. Si les premiers sont éponymes (chalet Peltier, Wallon, Renard, Crosnier, Bayard ; villa Elizabeth, Petit, Colin, Yvonne, etc.), ils empruntent ensuite au règne végétal (Les Tamaris, Les Capucines, L'Erable, Les Myrtilles, Les Lierres, Les Frênes, Les Marronniers, Les Prés, Les Tamaris, Les Bambous, Les Chrysanthèmes, Les Sorbiers, etc.) et animal (Les Mouettes, Les Hirondelles, La Renardière, etc.). Certains s'inspirent de la construction (Les Tourelles, Les Lampottes, etc.), d'autres de la mer (Les Embruns, La Caloge, Les Mouettes, etc.).
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Un style jubilatoire
À l'extérieur aussi, l'omniprésence du bois saute tout de suite aux yeux. C'est l'élément commun aux villas balnéaires du 19è siècle. S'il habille les murs de granit à La Baule, de brique à Deauville, le bois souligne l'appareillage de brique et silex en Pays de Caux. D'importants débords de charpente ouvragée protègent les pignons exposés au vent. Ils sont ornés de lambrequins*.
Les balcons à trame régulière, les enrouleurs de jalousie ou les frises sont peints aujourd'hui le plus souvent en blanc. Depuis peu, on voit même apparaître le rouge basque qui sied plutôt bien à nos valleuses.
Les toits à forte pentes et longs rampants sont très ouvragés. L'ardoise naturelle est majoritairement employée (associée à l'arrivée du chemin de fer à Fécamp en 1856), même si quelques tuiles de Varengeville apparaissent çà et là (villa Colin jusqu'en 2006). Sur les tourelles et clochetons, on remarque la ligne de déchange, sorte de frise d'ardoise. Les toits en terrasse sont nombreux, notamment dans les tours, folies et belvédères. Les souches de cheminées sont en brique surmontées de mitres en terre cuite, parfois vernissées comme à la villa «Les Lampottes».
Des ancres de construction souvent très élaborées - et même éponymes - terminent les tirants fixés sur la charpente. Sur le chalet Peltier, les ancres des cheminées sont terminées par des queues de cochon, ce qui laisse à penser qu'il s'agit de la signature du ferronnier Marou, artiste qui signa la fontaine de la Bénédictine de Fécamp.
Des faîtières en zinc ou en bois avec épis de faîtage couronnent le toit d'un magnifique feston.
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Des emprunts mutuels.
Les jeux d'ombres et de lumière sont accentués par le calepinage (travail en relief de la brique). Ainsi, corbeaux, corniches et larmiers maçonnés à plat ou en dents de scie déterminent des angles aux multiples éclairages. Les assises alternées de brique et silex, les chaînes harpées de pierre ou de brique et le damier de silex noir et blanc permettent de décliner les combinaisons à l'infini.
Les joints:
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Les briques :
Les briqueteries :
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Les frises :
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Parfois, ces détails périphériques ne sont que l'évolution de ce qui existait déjà dans les premières maisons de pêcheurs...
Ainsi, la villa balnéaire cauchoise, née de l'emploi de matériaux indigènes dans une architecture exotique, est bien la preuve que des emprunts mutuels peuvent contribuer à forger une identité régionale forte.
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Patrick Lebourgeois