Que j'aime ce petit village
Que voile un détour du chemin,
Dont, tout-à coup il se dégage
Comme s'il sortait d'un ravin.
De loin, aux regards il dérobe
Son joli nid plein de senteurs,
Et soudain, découvre sa robe
De pommiers, de poiriers en fleurs.
Gracieux et rempli de charmes,
Il se cache d'un air discret;
Mais coquettement sous les ormes,
Il trahit bientôt son secret.
Il ressemble à la fleur modeste
Que son parfum fait découvrir
De ce hameau riant, agreste,
On ne voudrait jamais sortir.
Pour couronne la mer immense
Le baigne de ses flots mousseux
Et la barque qu'elle balance,
Vient encore égayer les yeux.
Enfin dans cet Eden, on trouve
Le grandiose et le charmant,
Et le bien être qu'on éprouve
Est chaque jour plus ravissant.
Quand l'amitié nous y convie,
Et nous reçoit dans son castel,
Bien douce pour nous est la vie
Qu'on nous fait sous ce coin du ciel!
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Les Petites-Dalles devant la Grande bleue
Ah! C'est pour devenir parfaitement heureux
Et quel joli pays pour se reposer!
C'est pour jamais s'en séparer...
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Et si ce n'était que bois,
Ce ne serait pas une telle joie,
Et si ce n'était que blé
Ce ne serait pas si gai,
Et si ce n'étaient que falaises,
Je ne me sentirais pas à mon aise
Et si ce n'étaient que vaches,
Ce ne serait pas sans tâches.
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Mais ce qui le rend si beau
C'est la combinaison... c'est le Pays de Caux!
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Sur le frais rivage de la Manche où la dureté des galets vous transperce les pieds, chaque séjour à la plage s'apparente à une lutte recouvrant une infinité de plaisirs cachés. Imperceptibles au premier abord, ces plaisirs minuscules sont l'un des attraits de l'existence du Parisien en vacances à Etretat. Dans cette station qui ne compte ni grands hôtels ni boîtes branchées, les activités balnéaires sont fondées sur la répétition de gestes apparemment pénibles : mettre les pieds dans l'eau glacée, prendre un bain de soleil sur les cailloux, sentir la bise du Nord en plein mois d'août, se baigner sous la pluie ; tout cela s'apprend et finit par se déguster. Ce sont nos aventures minuscules, très différentes des aventures grandioses ; elles exigent d'accomplir sans fin le même rituel qui peu à peu transforme la souffrance en routine et la routine en plaisir.
Plusieurs fois par jour, les habitués de la station recommencent leur déambulation sur le Perrey, cette promenade panoramique qui longe la plage d'une falaise à l'autre. Les plus courageux « font » leur premier Perrey dès te matin, en allant chercher le journal ; ils en profitent pour glaner une nuance de couleur ajoutée à leur répertoire : comme ces miroitements argentés de la mer au début du jour. Sur le Perrey, l'habitué d'Etretat croise presque toujours d'autres groupes de sa connaissance et ils s'arrêtent un instant pour bavarder, sans s'éloigner des sujets convenus (comment ça va ? Quel beau temps! Un peu frais, quand même... Tu iras au mariage de la petite Machin ?). Ces échanges très faibles, mais pas totalement inconsistants, apportent au promeneur une légère excitation d'ordre social. Après quoi chacun reprend son chemin.
Le véritable Etretatais n'interrompt jamais très longtemps sa marche ; il « fait » son Perrey comme une marche militaire, ponctuée par de brefs moments sociaux. Sa foulée rapide conjugue la contemplation et l'exercice physique. Et, quand la saison s'achève ou que souffle la tempête, c'est encore sur le Perrey que se retrouvent au grand air les Parisiens en week-end pour contempler le spectacle de l'océan déchaîné ; chaque coucher de soleil leur permet d'admirer une dernière transformation rose des nuages, en échangeant des banalités. Certains soirs, par temps clair, ils se rassemblent devant le casino au coucher du soleil, pour tenter de saisir ce fameux « rayon vert », censé apparaître au moment où l'astre plonge dans les flots. Certains habitués affirment ne l'avoir jamais vu. D'autres prétendent l'observer souvent. Cette question minuscule continuera d'alimenter le bavardage qui demeure ici, la principale forme de conversation: une façon de tourner autour de quelques dérisoires sujets d'intérêt local, d'y revenir toujours aux mêmes périodes de l'année en les variant légèrement, comme s'il était vain de se lancer dans des considérations plus sérieuses.
En saison, le Parisien d'Etretat respecte scrupuleusement les horaires du bain. A 13 heures et 18 heures, il prend possession de la plage, au moment précis où les touristes s'en éloignent. Commencent alors les réflexions sur la température de l'eau, inépuisable sujet qui affecte toutes les générations de baigneurs.
La question se pose objectivement en approchant du rivage, face au vent du Nord qui souffle sur la plage par beau temps. Quelques minutes avant, allongé au soleil sur la pente de galets, vous aviez presque chaud. Devant la mer, vous serrez frileusement vos bras autour du ventre. Une vague plus longue que les autres lèche vos orteils et vous envoie une décharge glacée. Chaque baigneur se demande pourquoi entrer dans ce liquide cruel où chaque jour, il s'inflige la même étrange punition ; mais il sait qu'il en ressortira plus, joyeux ; pendant le bain, il éprouvera même certaines sensations délicieuses. Pour l'heure, le voilà figé parmi les autres baigneurs hésitants. Leurs pieds se mettent progressivement à température ; le reste du corps est toujours gelé.
Ceux qui terminent leur bain s'approchent du rivage en nageant avec volupté ; leur tête satisfaite émerge, un brin provocante, tandis que recommence l'inépuisable série de répliques répertoriées : « Elle me paraît froide, ce matin », dit celui qui va se baigner. « Il suffit d'y aller, elle est très bonne », rétorque celle qui sort de l'eau. « Au fond, nous sommes un peu masochiste » grommelle cet ironiste qui, l'autre soir, assurait n'avoir jamais vu le rayon vert. « Hou la la, c'est glacial ! », s'écrie un nouvel arrivant, comme s'il apprenait à la communauté quelque chose d'important. « N'hésitez pas, elle est délicieuse ! », conclut un optimiste, le plus agaçant de tous : descendant rapidement la pente de galets, il plonge d'un coup sec en éclaboussant tout le monde, disparaît sous l'eau, puis ressort la tête et s'éloigne en crawlant.
Ces dialogues n'ont guère de sens, car la température de l'eau, au mois d'août, est toujours la même, oscillant entre 17 et 19 degrés ; nul ne l'ignore. Chacun sait pourtant qu'il éprouvera chaque jour ce même doute au moment du bain ; et chacun sait qu'il appréciera ce plaisir revigorant. Mais le débat continue et se reproduit, année après année, avec la même spontanéité. Et l'on songe à nouveau que ce babillage, cet échange de sons et de fluides, doit être le simple bruit de fond qui accompagne la vie des bêtes. Mais il révèle aussi l'esprit de cette bourgeoisie en vacances qui ne s'ennuie jamais dans ses rituels, parle pour passer le temps, sans se départir d'une amabilité délicieusement artificielle. Ainsi peut-elle revenir continuellement aux mêmes questions, avec une naïveté mêlée d'ironie, un discret sourire qui laisse entendre qu'elle n'est pas dupe, mais que tout cela fait partie de l'art de vivre à Etretat.
Benoît Duteurtre.