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Pour la plupart des Petits-Dallais, dont je fais partie, le mot « lampotte » désigne une patelle ou « chapeau chinois ». Ce petit mollusque de forme conique vit attaché aux rochers. Il sert d'appât aux pêcheurs. |
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Les 2 principales explications, du nom de la villa « les lampottes » que nous avons entendues, tournent autour de ce mollusque :
J'ai donc été surpris, en lisant dans «Un correspondant très particulier» de Frank Gilles, la phrase suivante :
« Une bâtisse monstrueuse, dans le style normand pourvue de deux tours coniques ou lampottes qui donnèrent leur nom à la villa ».
Comment pouvait-il comparer une tour à une patelle ?
Ma surprise s'est accrue, à la lecture de la description qu'en donnent deux contemporains :
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Henri Stephan Opper de Blowitz, créateur des « lampottes » précise dans ses mémoires, ("My memoirs") les points suivants :
Blowitz, réputé affabulateur, se contente d'une provenance banale pour cette vierge. Si elle avait réellement été repêchée en mer, il n'aurait pas manqué de rapporter cette origine tellement plus romanesque.
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Madame Bory d'Arnex a connu Blowitz aux Petites-Dalles. Dans « Un salon parisien d'avant guerre », sous le pseudonyme de Jacques Vincent, elle écrit :
« Les Lampottes! Magnifique cottage fièrement isolé, perché sur le haut de la falaise qui surplombe la plage des Petites-Dalles. D'où ce nom bizarre? Les paysans ont ainsi désigné les deux tourelles - pour eux petites lampes - suspendues à chaque extrémité de la façade. Les Lampottes! Un ruissellement de lumière par toutes les nombreuses fenêtres plongeant sur la mer et les bois ».
Ces trois textes concordants ne peuvent pas faire référence, pour le mot lampotte, au sens de patelle.
J'ai trouvé une première piste dans le "Dictionnaire du Monde Rural" de Lachiver qui donne à ce mot le sens de «ver luisant», pour la région du Havre.
J'ai ensuite interrogé Madame Michèle Schortz, que je remercie pour son aide. Madame Michèle Schortz a soutenu une thèse à l'Université d'Uppsala sur le parler de Senneville. Elle a fait des recherches sur le parler Yportais que vous pouvez consulter sur l'intéressant site, sur Yport, de Guillaume Lemaître.
Dans ses recherches sur Senneville et sur Yport, Madame Michèle Schortz n'a pas rencontré le mot lampotte dans le sens évoqué dans nos trois citations. Elle s'est donc lancée dans un patiente enquête dans les dictionnaires spécialisés, dont voici les conclusions.
Il existe deux mots différents :
Il faut préciser que la variante orthographique n'a rien d'absolu, car la transcription, avec un ou deux «t», de mots du langage parlé est très aléatoire.
Pour revenir à la villa «Les Lampottes», les cônes très pointus des toitures des tourelles sont bien différents des cônes aplatis et asymétriques des patelles.
Par contre, chacune des deux demi tourelles de la façade qui domine la vallée peut rappeler une lanterne comme celle illustrant la revue de Henri Rochefort. En conclusion,l'interprétation du nom de la villa "Les Lampottes" a été faussée par la méconnaissance, du mot "lampote" ou "lampotte" dans le sens de lampe. Cette confusion aurait-elle pu être évitée, par la connaissance du parler local ? Il serait donc intéressant d'obtenir des réponses à la question suivante : Ce mot, est-il encore utilisé, dans les environs des Petites-Dalles, au XXI° siècle comme il l'était au XIX°, dans ce sens de lampe ou de ver luisant ? |
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Frank Giles: Un correspondant très particulier: Blowitz du Times. Trévise, Collection Le Dessous Des Cartes, 1964.
Blowitz: My memoirs. Londres 1903.
Jacques Vincent: Un salon parisien d'avant-guerre. Editions Jules Tallandier, Paris 1929.